Niamey, 08-10 Décembre 2016
Le Colloque régional sur la Radicalisation et l’Extrémisme Violent dans le Sahel, organisé conjointement par la Mission de l’Union africaine pour le Mali et le Sahel (MISAHEL), le G5 Sahel et le Gouvernement de la République du Niger, s’est tenu du 08 au 10 décembre 2016 à Niamey.
Il a enregistré la participation de la Représentante Spéciale Adjointe du Secrétaire Général des Nations-unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), de la Mission multidimensionnelle Intégrée des Nations-Unies pour la Stabilisation au Mali (MINUSMA), de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), d’une représentante de l’Envoyé Spécial de l’Union Européenne pour le Sahel, du Centre Africain des services de Renseignement et de Sécurité (CISSA), de l’Unité de Fusion et de Liaison (UFL), de la Coopération suisse au Niger, et de l’Envoyé Spécial du Royaume du Danemark pour le Sahel.
Le Colloque a également regroupé des représentants des pays de la région et plusieurs acteurs (femmes, jeunes, leaders religieux, médias, universitaires, décideurs politiques, parlementaires, etc.), impliqués dans la recherche de solutions contre la Radicalisation et l’Extrémisme Violent, venus de l’Algérie, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée (Conakry), du Mali, de la Mauritanie, du Niger, du Sénégal, et du Tchad.
La cérémonie d’ouverture a été marquée par six (6) interventions : les allocutions du Chef de la MISAHEL, SEM Pierre Buyoya, de la Représentante Spéciale Adjointe du Secrétaire Général des Nations-Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), Madame Selassié, du Secrétaire Permanent du G5/Sahel, SEM. El Hadj Najim Mohamed, du Président de la Ligue des Oulémas, Imam Cheikh Daouda, du Vice-Président de l’Assemblée Populaire Nationale d’Algérie, SEM Lakhdari SAID et le discours d’ouverture du Ministre des Affaires Etrangères, de la coopération, de l’Intégration Africaine et des Nigériens à l’extérieur, Monsieur Ibrahim Yacoubou.
Dans son propos introductif au Colloque, SEM Pierre Buyoya, Haut Représentant de l’Union africaine pour le Mali et le sahel a rappelé un certain nombre d’initiatives internationales, notamment des Nations unies et de l’Union africaine, qui avaient identifié depuis l’année 2012 les défis de la sécurité, de la Gouvernance et du développement dans la région du sahel. Il a indiqué que face à ces défis, la communauté internationale et les pays de la région ont concentré leurs efforts sur les questions de sécurité, en particulier sur la menace du terrorisme qui, avec le temps, est apparue comme une menace dépassant la région sahélo-saharienne et concerne désormais l’ensemble de la communauté internationale.
Mme Selassié, s’est réjouie de l’organisation du colloque sur le thème proposé qui est un défi majeur de pays du Sahel, avec la participation d’acteurs et partenaires majeurs pour des réflexions approfondies sur les choix stratégiques à faire contre la radicalisation et l’extrémisme violent qui ont relégué les autres défis au second plan.
Dans son allocution, le Secrétaire Permanent du G5/Sahel, Monsieur Najim Elhadj Mohamed a rappelé que le présent Colloque se situe dans le prolongement de celui qui s’est tenu à Bamako en octobre 2016 qui a démontré une fois de plus, la forte mobilisation de l’ensemble de la communauté autour du phénomène de la radicalisation et de l’extrémisme violent et la forte prise de conscience de l’urgence d’agir et de présenter un front commun face à ce fléau.
Le Président de la ligue des Oulémas, Prêcheurs et Imams des Pays du Sahel, Cheikh Boureima Abdou Daouda a, quant à lui, noté que les solutions à l’extrémisme violent et à ses conséquences ne doivent pas être seulement militaires mais aussi politiques, idéologiques, éducatifs, économiques, sociaux et de renseignements. Il estime que les leaders religieux sont engagés pour l’amour, la paix, la fraternité, la solidarité et l’unité en raison de leurs rôles d’éclaireurs, de médiateurs et d’arbitres impartiaux.
Monsieur Lakhdari SAID a présenté la lutte contre la radicalisation comme une action qui vise à promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité, sont des facteurs essentiels pour porter la contradiction aux idéologies déviationnistes. Dans ce cadre, l’expérience algérienne, qui a fait face seule à ce fléau, peut constituer une référence pour l’ensemble des pays.
Dans son discours d’ouverture, SEM Ibrahim Yacoubou, Ministre des Affaires étrangères, de la Coopération, de l’Intégration africaine et des nigériens à l’extérieur, a présenté les actions entreprises contre la Radicalisation et l’Extrémisme violent comme un combat d’idées pour déconstruire l’idéologie qui les fonde. Il a ainsi exprimé sa confiance quant au succès des travaux du colloque tout en rendant un hommage appuyé aux forces de défense et de sécurité des pays de la région pour la ténacité avec laquelle elles mènent le combat contre le terrorisme.
Durant les travaux proprement dits, les communications suivantes ont été enregistrées :
Session Liminaire : Introduction au phénomène de radicalisation et d’extrémisme violent dans le Sahel
- La session liminaire a été introduite par Monsieur El Hadj Nadjim, qui s’est réjoui de la forte présence de tous les acteurs intéressés par la question avant de rappeler les objectifs du colloque qui doit aboutir à une stratégie commune contre le phénomène. L’étape de Niamey à la suite de celle de Bamako, devrait aboutir à des choix stratégiques.
- La communication introductive a été livrée par Dr Bakary SAMBE, par ailleurs modérateur de la session liminaire. Il a d’emblée posé le postulat selon lequel il y a certes le primat du défi sécuritaire dans la lutte contre le terrorisme, mais la question de la prévention constitue désormais un enjeu important. Il a ensuite soulevé les difficultés à s’accorder sur les concepts de radicalisation et d’extrémisme violent.
- La première communication, faite par l’Imam Cheikh Daouda, Président de la Ligue des Oulémas, Imams et Prêcheurs du Sahel, a porté sur le thème : Radicalisation et extrémisme violent sont-ils des phénomènes religieux ?
- Deuxième communication portant sur la Cartographie des stratégies et initiatives de prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent a été présentée par Dr Lori Anne Theroux-Bénoni, directrice de l’ISS de Dakar.
- La troisième communication faite par M. Aboubacar Sadikh Ndiaye a porté sur les Nouvelles technologies de l’information et radicalisation dans le Sahel.
- Le cas des initiatives de prévention en Somalie et au Nigeria a été présenté par Dr Yasmine Farouk.
- La session a également permis d’échanger sur des préoccupations partagées et de dégager des pistes d’axes stratégiques (voir annexe)
La session I avait pour thème principal : Expériences et pratiques positives dans la prévention et la lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent dans le Sahel
- Cette session consacrée au thème principal a été animée par les représentants des gouvernements de la République d’Algérie, de la République Islamique de Mauritanie, de la République du Tchad et de la République du Niger. Ces différentes interventions ont été modérées par Pr Boubé Namaïwa, de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar qui a livré à l’assistance sa réflexion sur le phénomène de la radicalisation, réflexion intitulée « Les fondements de la dé-radicalisation : déconstruction et reconstruction du discours en Islam ».
- La deuxième journée du colloque a été consacrée à des échanges sur les stratégies, programmes et initiatives des partenaires.
- Quatre partenaires importants du colloque ont livré à l’assistance leurs stratégies. Il s’agit du Secrétariat permanent du G5 Sahel, de l’Union Européenne, du Royaume du Danemark et du CISSA.
- L’expérience et la stratégie du Secrétariat permanent du G5 Sahel ont été partagées par Monsieur Mahamadou SAMAKE, expert gouvernance du G5 Sahel.
- La Session II avait pour thème principal : La société civile dans la prévention de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent.
- Dans le cadre de cette session, modérée par l’Honorable Babara FOFANA de la République de Guinée, trois communications ont été délivrées. Toutefois, le modérateur a d’abord donné la parole à l’ambassadeur Sidi Mohamed Sidaty, qui a présenté la stratégie multidimensionnelle de la Mauritanie contre l’extrémisme violent.
- La première communication a été faite par Me Diallo Sissoko Geneviève de la République de Côte d’Ivoire, la deuxième communication par Mme Ndeye Sagar Tall de la République du Sénégal. La dernière communication de cette session, faite par le Pr Ali Mahamane de l’Université de Diffa, a porté sur le thème suivant : « Quels choix stratégiques de l’Université de Diffa pour faire face au phénomène de radicalisation et de l’extrémisme violent dans le Sahel ? De l’expérience aux bonnes pratiques ».
- La troisième journée des travaux a débuté avec la Session III : Les travaux de cette session, modérée par l’Ambassadeur Boubacar Gaoussou Diarra ont porté deux points : une communication faite par Mme Yousra Hamdaoui sur un aperçu des réseaux de financement de la radicalisation et de l’extrémisme violent dans le Sahel puis, des discussions sur les éléments de convergence dans les stratégies, programmes et initiatives de prévention et de lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent au Sahel.
- Le Comité de rédaction des conclusions des travaux du Colloque a présenté un document faisant le point des éléments de convergence entre les différentes actions, initiatives, plans et programmes présentés par les différentes organisations, régionales ou internationales et les pays. Le document a été présenté en plénière par Monsieur Boukari BIRI KASSOUM, le deuxième rapporteur du Colloque.
- Les axes stratégiques proposés ont fait l’objet de débats et d’échanges fructueux qui ont permis d’y apporter des modifications significatives. En définitive, le Colloque a retenu des axes stratégiques (voir annexe).
- La Session IV a porté sur la synthèse des travaux.
- Modérée par l’Ambassadeur Kasadi, les conclusions du Colloque ont été présentées par le Rapporteur Général du Colloque, Monsieur Mahamadou SAMAKE.
- La stratégie Régionale de prévention et de lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent au Sahel sera élaborée sur la base des axes stratégiques retenus par le Colloque.
- A l’issue de ces trois jours de travaux intenses, il se dégage des différentes interventions, des communications faites par les experts et des débats qu’ils ont suscités les principales conclusions qui suivent.
- Les principales causes de la radicalisation et de l’extrémisme violent ont, une fois de plus, été passées en revue. On peut retenir:
- L’instrumentalisation des religions pour servir la cause des terroristes même s’il faut se garder de stigmatiser telle ou telle religion comme étant vecteur de la radicalisation ;
- L’extrême pauvreté, la marginalisation de certaines couches (les Jeunes, les Femmes, les Handicapés…) ;
- L’étendue des frontières et leur porosité qui rendent difficile leur contrôle ;
- Les difficultés rencontrées par les forces de défense et de sécurité (FDS) à jouer pleinement leur rôle ;
- l’insuffisante implication des populations aux questions touchant à leur propre sécurité ;
- le chômage massif des jeunes ;
- le sentiment d’exclusion ou de marginalisation.
- Le phénomène est quelques fois aggravé par les lacunes au niveau de l’appareil judiciaire, entrainant la radicalisation de personnes innocentes du fait de leur incarcération, parfois à tort, et qui se trouvent ainsi en contact avec des terroristes aguerris.
- Il est également ressorti des débats la nécessité d’associer davantage à la conception et à la mise en œuvre des stratégies de prévention et de lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent certaines catégories de personnes en raison de leur rôle spécifique dans nos sociétés :
- les chefferies traditionnelles et les autorités coutumières ;
- Les Jeunes et les femmes ;
- Les journalistes, les médias publics et privés
Le colloque a suggéré de :
- recourir à nos cultures authentiques en tirant le meilleur de certaines pratiques ancestrales comme le cousinage à plaisanterie
- d’instaurer des cadres de dialogues culturels et inter religieux
- de promouvoir des centres d’activités socio-culturelles
- Le Colloque a été l’occasion d’échanges d’expériences avec les différents acteurs actifs en matière de lutte contre l’extrémisme violent (pays, les organisations sous-régionales, les organisations internationales). Il a permis d’approfondir le diagnostic et l’état des lieux entamé à Bamako, et a adopté un certain nombre d’axes stratégiques qui seront les piliers de la Stratégie Régionale de prévention et de lutte contre la radicalisation ;
- Enfin le Colloque recommande aux organisateurs :
- d’améliorer la programmation des activités liées à la préparation des prochains Colloques ;
- de distribuer les documents du colloque en temps utiles aux participants ;
- de distribuer aux participants les différents documents issus des colloques dans des délais raisonnables.
- Le Colloque félicite la Commission d’organisation pour la qualité de son travail qui a permis le déroulement des travaux dans d’excellentes conditions.
- Le Colloque adresse ses vifs remerciements au Gouvernement et au Peuple nigériens pour l’accueil chaleureux et l’hospitalité réservés aux participants dans la pure tradition africaine tout au long de ces trois journées de travaux.
Niamey, le 10 décembre 2016
Le colloque